ERNEST ET HELOÏSE ALLIOT
Ernest et héloïse ALLIOT sont les grands parents paternels de Maurice ALLIOT (pour revoir et éventuellement imprimer la généalogie de cette branche de la famille paternelle de Maurice, cliquer ici puis agrandir à l'aide de la loupe). Leurs enfants sont Juliette (elle épouse Eliacin ROL et ils donnent naissance à une lignée de cousins dont les ALLIOT-LIMASSET resteront très proches) et René, qui épouse Marie VERTRAET: Ce sont les parents de Maurice.
Ernest est né à Bohain en 1824 de l’union de François Alliot et de Marcelline (voir acte de mariage) appelée aussi Séraphine Hennequin. Il est le second des 3 enfants du couple, entre Zéphirine, son aînée de 8 ans, et Léon, né 2 ans après lui. François Alliot dirige avec le frère aîné de sa femme, Henri Hennequin, une usine de tissage qui fabrique des châles en utilisant des écheveaux de soie importés des Indes (voir chapitre précédent consacré à la fabrique ALLIOT-HENNEQUIN). Les ateliers alors étaient situés à l’emplacement, marqué sur le plan ci-dessous par le n° 5, des futures usines textiles Dubly (rasées par les bombardements de la seconde guerre mondiale) et leurs terrains se prolongeaient jusqu’à la rue Sauret Robert, soit, une partie de la future usine R.Alliot, Rol et Cie (n°3).
plan de BOHAIN (cliquer sur le plan pour ouvrir dans une nouvelle fenêtre - cliquer sur la loupe pour agrandir. Même chose pour la page d'explications ci-dessous)
On ne sait pas grand-chose de la jeunesse d’Ernest.
« Ernest ALLIOT, mon grand-père, est né a Bohain en 1823, il y est décédé le 23 Septembre 1889. Il est inhumé dans la tombe de Honoré PARINGAULT (...). Son épouse Héloïse PARINGAULT, née en 1836, décédée à Bohain le 10 novembre 1925, est dans la même tombe, ainsi que mon jeune frère"
Remarque: Honoré Paringault, cité ici, nous est plus connu sous le prénom de Charles Etienne; il s'agit du père d'Héloïse. Il est courant à l’époque d’avoir à l’état civil 3 ou 4 prénoms dont le prénom usuel est le plus souvent le second, mais parfois aussi le 3ème, voire le 4ème ! (Maurice a fait des recherches et conservé des souvenirs de ces aïeux PARINGAULT, du côté d'Héloïse: Ils font l'objet d'un autre chapitre)
Ernest s’intéresse en tout cas à l’entreprise familiale et, le jour venu, il en devient à son tour le patron. Il continue à développer, entre autres tissus, la vente et l’exportation des fameux châles de cachemire, jusqu’à ce que le contexte économique et politique remette en cause cette mode lancée par Eugénie, épouse de Napoléon III, au lendemain de la guerre de 1870.
« Il habitait dans l’usine", rapporte Maurice dans ses notes, "un grand bâtiment aujourd’hui disparu, qui n’était pas loin de l’ancienne église ».
En 1856, Ernest a épousé Héloïse PARINGAULT, née en 1836, de 12 ans sa cadette et de cette union sont nés successivement Juliette, en 1857, puis René, en 1858.
L'année 1870 marque un certain tournant dans la vie d’Ernest. Il est déjà très engagé dans la vie politique et municipale . Les événements d'ailleurs, comme en témoignent les récits de son fils René et les notes de Maurice, le placent alors en première ligne... Une anecdote familiale rapporte que, bien des années plus tard, en août 1914, Héloïse qui rechignait à quitter Bohain pour suivre ses enfants à Paris, s'était écrié " « J’ai bien vu les Prussiens à Bohain en 1870, disait-elle, votre grand-papa a failli être fusillé deux fois parce qu’il ne voulait pas coopérer avec eux. Ce sera moins grave cette fois, puisque mon mari n’est plus de ce monde ! » Lorsque le commerce des châles décline, Ernest, plutôt que d'envisager une reconversion des productions de l'usine, se tourne tout naturellement vers ses activités d'élu et se consacre au développement de Bohain, sans négliger cependant l'activité économique de la ville, puisqu'il est l'un des promoteurs, en liaison avec la Société Industrielle de Saint-Quentin, d'une école professionnelle de tissage à Bohain même. Mais l'accès des Bohinais au confort de la vie moderne fait aussi partie des objectifs de la municipalité dont il fait partie:
Maurice écrit en 1968 :
« Conseiller municipal et adjoint au maire en 1870 , il est arrêté comme otage lorsqu’un allemand fut tué dans une rue de Bohain. Une rançon, vite rassemblée, évita le pire. A cette époque aussi, il y avait pénurie de monnaie, et mon grand-père signa de nombreux certificats portant une estampille, dont j’ai encore l’original, qui servirent pour les transactions entre les bohainais (nous avons connu des « jetons » destinés au même objet, pendant la guerre de 14-18)...
Ernest ALLIOT fut un des promoteurs de l’Ecole de Tissage de Bohain, créée avec l’aide de la Société Industrielle de Saint-Quentin. [Il] contribua vigoureusement à la construction, l’installation de l’usine à gaz et la surveilla longtemps.
Il fit installer la première et modeste distribution municipale d’eau – alimentation de fontaines place de l’Hôtel de Ville et place Verte, et aussi la fontaine du Lion, rue du Château – l’eau venant d’assez loin (j’ai entendu parler dans mon enfance de la fontaine Avilée ( ??).
Mon grand-père eut aussi à s’occuper des abattoirs et s’intéressa aux sociétés locales :
Secours mutuel, Société de Musique (il jouait de la flûte, nous avons encore l’instrument), Société des Archers (je me rappelle du grand arc délaissé)…
Il aimait à se reposer dans son jardin boisé du « Chêne brûlé » (Ce jardin, qu'on aperçoit au nord est de la ville, était alors très près de la frontière; il fut racheté ensuite par la ville à Eliacin Rol, époux de sa fille Juliette qui en avait hérité, pour en faire un emplacement pour colonie de vacances).
Le "Chêne brûlé" fait partie de l'histoire de Bohain autant que de la vie familiale jusqu'à une époque récente. Henri Matisse, natif de la ville, l'a d'ailleurs immortalisé sur l'une de ses toiles peinte en 1902 ou 1903 (voir histoire de Bohain), ainsi que Emile Flamand, en 1931 (ci-contre). Pour des générations de Bohinais, il a été un théâtre de jeux, un lieu de rendez-vous, ou simplement un symbole de la résistance de la ville de Bohain, ville souvent frontalière, aux agressions de l'étranger. Maurice évoque le "Chêne brûlé" dans ses souvenirs d'enfance: accès audio à cet épisode:
En 1929, René Alliot fait l'éloge de son père, 40 ans après la mort de celui-ci (voir le manuscrit page 1, page 2):
"Monsieur Henri Ernest Alliot est né à Bohain en 1824, et il y est décédé le 23 septembre 1889. Il était fils de François Alliot - décédé en 1866 à 83 ans, inhumé à Bohain - et de Marcelline Hennequin - décédée en 1869 à 76 ans, inhumée à Bohain, née vers 1793 - domiciliés à Bohain, et époux de Héloïse Paringault de Fontaine Notre Dame (Aisne). Monsieur Ernest Alliot a habité Bohain pendant toute sa vie. Il y a dirigé la fabrique de châles et tissus fondée par son oncle Henri Hennequin et par son père François Alliot. De cette fabrique sont sortis les châles cachemire français qui ont fait la réputation des tisseurs de notre région.
En vue de perfectionner cet art du tissage, Monsieur Alliot a été un des promoteurs de l'installation, à Bohain, d'une école de tissage par les soins de la Société Industrielle de St-Quentin, école qui depuis a pris une grande extension et a rendu tant de services au tissage de la région de Bohain, et même de la région avoisinante, dans le département du Nord.
Son activité et son intelligence ne se sont pas bornées à l'exercice et au perfectionnement de son industrie, mais, pendant de nombreuses années, comme conseiller municipal, adjoint et maire, il s'est appliqué à satisfaire aux besoins de sa ville et on peut énumérer parmi les oeuvres auxquelles il a collaboré et souvent créées:
La construction et la surveillance de l'usine à gaz, l'abattoir, l'adduction d'esu de source pour les fontaines de la Place Verte, la société de secours mutuel, la société de musique....etc. On le trouve partout où il y faut travailler et ouvrir sa bourse pour le bien de ses concitoyens.
En 1870, il est arrêté par les Allemands et menacé d'être fusillé par représailles, un des leurs ayant été tué dans une rue de Bohain; pendant cette période critique de 1870, il réussit à donner du travail et à payer son personnel, grâce à la confiance qu'il inspire aux commerçants de Bohain, qui acceptent en paiement des bons portant sa signature.
Cette vie si bien remplie avait épuisé ses forces et c'est jeune encore, à 65 ans, qu'il quitte les siens pour qui il reste toujours l'aïeul respecté et aimé.
Sa veuve Mme Alliot, toujours attachée à Bohain et à ses souvenirs, ne l'a quitté que chassée par la grande guerre, et y est rentrée aussitôt après, malgré la complète dévastation de sa maison, et elle s'y est éteinte à l'âge de 91 ans."
Signé René Alliot, 15 septembre 1929.
Ernest ALLIOT fut maire de BOHAIN pendant quelques mois, avant que la mort ne l’enlève à la Ville et aux siens, le 23 septembre 1889. Un extrait d'acte de décès, délivré en 1921, témoigne de la présence sur les lieux, en qualité de témoin, d'Eliacin Rol, gendre d'Ernest. Juliette et lui, qui habitaient à Paris, avaient donc pu se rendre à son chevet.
Et voici un hommage rendu à Ernest ALLIOT pour son rôle auprès de la municipalité de BOHAIN, par E. Delacourt, Conseiller Municipal, ancien adjoint au Maire: On y apprend que l'engagement d'Ernest Alliot était précoce puisque "il avait à peine atteint l'âge légal que déjà ses concitoyens l'appelaient à l'honneur de les représenter au Conseil municipal" et qu'ainsi il était déjà adjoint au Maire en 1859... Juliette avait alors 2 ans, et René n'en avait qu'un. On y apprend aussi qu'en plus de toutes les activités que lui valaient ses charges d'élu ou de conseiller d'arrondissement pour la ville de Bohain, il dirigeait la Société de secours mutuel, la Caisse des Ecoles ou encore la Société de Gymnastique! Ernest est élu maire de Bohain en 1888. Mais la maladie va l'empêcher d'exercer ses fonctions plus de quelques mois.
le 26 décembre 1930, en hommage à cet ancien maire et bienfaiteur de la ville, une décision du conseil municipal devait transformer la Rue du Château, qui s'étend de la Fontaine du Lion à la porte de Guise, en rue Ernest Alliot, en hommage à cet ancien maire et bienfaiteur de la ville. Mais la rue du Château était trop ancrée dans la culture de la ville. Les plaques ne furent jamais posées et la rue garda son nom d'origine, beaucoup plus parlante il est vrai, le Château ayant bien plus marqué l'histoire !
Ci-dessous la maison familiale à Bohain
C’est avec la fabrique de câbles et fils électriques de BOHAIN, fondée en 1899 en complément de l’usine de Reuilly à PARIS, que René ALLIOT, fils d’Héloïse et d’Ernest, va renouer avec l’activité industrielle bohainaise de son père et de son grand-père, aidé par son beau-frère Eliacin ROL, avant que Maurice lui-même ne reprenne à son tour les affaires. On continuera à suivre ainsi à la fois la famille d'Ernest et d'Héloïse, et leur chère ville de Bohain dans les chapitres consacrés à René, puis à Maurice, ou dans le texte consacré à Bohain.
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Avant de quitter Ernest et Héloïse, faisons un petit détour par la tante Alexia.
On sait qu'Ernest avait une soeur aînée, Zéphirine, et un frère cadet, Léon (Léon Alliot devait lui aussi travailler dans l'entreprise Alliot-Hennequin. Zéphirine, née en 1815 se maria à Monsieur Jean-Charles LEFEBVRES. Ceux-ci ont eu une fille, nommée Anaïs, qui épousa un certain Jules Adolphe PETEAU, piqueur de cartons demeurant à Bohain. Son métier (on dit aussi liseur) est très répandu à Bohain: il consiste à lire, analyser un dessin pour tissu et à percer de trous disposés correctement les cartons montés dans le métier à tisser.
Alexia-Anaïs, née à Bohain le 13 octobre 1863, est l'enfant de ce couple (voir acte de naissance). C'est donc une cousine au second degré de Maurice ALLIOT. Zéphirine est décédée le 24 décembre 1888, à l'âge de 73 ans (voir). Elle demeurait à Bohain.
Contrairement à sa fille Anaïs, décédée prématurément, Zéphirine est toujours de ce monde, donc quand, le 10 novembre 1883, sa petite fille Alexia, qui a tout juste vingt ans, épouse à Bohain Monsieur Henri VINCENT, né lui même le 13 décembre 1856 à Marchiennes (Nord) de Géry Vincent et de Angéline Vineau...
Ayant fait honorablement son service au 5ème régiment de Dragons, qui l'a incorporé dans ses rangs le 10 décembre 1877, il est libéré du service actif le 30 juin 1882. Gendarme à cheval, il contracte en service commandé un mauvais rhume qui va dégénérer en bronchite chronique et l'obliger au repos à partir de juillet 1893. Pour cette mise à la retraite pour raison de santé, au bout de 16 ans de services, les autorités lui délivrent alors un document témoignant de l'estime et de la satisfaction de ses chefs..." (voir document) Le couple, qui n'a pas d'enfant habite au n°53, rue de Cambrai, à Bohain.
Alexia et Henri VINCENT en 1923
Alexia va vivre presque centenaire jusqu'en 1962, et Maurice lui rendra régulièrement visite à l'hospice de Bohain où elle terminera ses jours. Elle a survécu 30 ans à son pauvre Henri, décédé le 10 décembre 1932, à 56 ans.
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Au cimetière de BOHAIN sont enterrés Ernest († en 1889) et Héloïse († en 1926), dans le caveau HONORÉ où ont également été inhumés Aimable HONORÉ et Aglaé sa femme, soeur d'Héloïse. Dans un petit monument à part ont été enterrés Clotilde HONORÉ, morte en bas âge, et le "petit Henri", jeune frère de Maurice décédé à l'âge de 2 ans en 1897. ***** Chapitre suivant: